Remettre l’humain au cœur de l’Ecole

30.05.2023

 Je désirais partager mon désarroi quant à l’évolution inquiétante de mon métier. Comme peuvent en témoigner les nombreux départs spontanés inattendus au sein de l’Education nationale l’an dernier, je ne peux que constater que nous sommes très loin du métier que j’ai connu au début des années 2000 lorsque j’ai pris mon premier poste (et je ne fais pas allusion aux enfants ou aux parents).

Pour commencer, dès la première année de maternelle (niveau que je commence à bien connaître), les consignes émanant de la DENJS nous rappellent que nous ne sommes plus qu’à 14 ans du baccalauréat ! Les mercredis sont dès lors OBLIGATOIRES (malgré le fait que certains petits qui n’auront que 3 ans en décembre sont épuisés dès la première semaine de classe) pour ne citer que cela.
Et c’est le début de la mise en place d’une infernale machine de guerre, d’une course à l’armement, d’exigences qui chaque année vont crescendo. Tout cela en nous imposant de tenir un discours parfaitement incohérent : arrêtez les tablettes et les écrans à la maison mais nous, nous leur mettons sous le nez tablettes, VPI, TBI et autres (et gare aux enseignants qui ne montrent pas, lors des inspections, qu’ils y ont régulièrement recours). 

Je n’aborderai pas la quantité de devoirs sous laquelle certains de nos enfants croulent dès le plus jeune âge. Bien entendu, tout cela n’a pour but ultime qu’une seule chose, le Graal, les 100% de réussite au Baccalauréat, et comme la DENJS le rappelait lors de son courrier de rentrée aux professeurs, pérenniser l’excellence de l’enseignement monégasque (et tant pis pour le bien-être, l’épanouissement de nos petits….).

J’estime, et je prends pour exemple mes propres enfants dont la différence d’âge me permet certaines comparaisons, que nos charmantes petites têtes blondes ne s’épanouissent plus à l’école, que les enfants en difficulté aujourd’hui ne l’auraient pas été il y a 20 ans. On propose alors à ces enfants une multitude d’aides humaines (AVS, enseignant d’intégration…) qui surchargent la classe (et parfois rendent l’atmosphère plus tendue) au lieu de revoir un petit peu les ambitions à la baisse et se focaliser sur l’essentiel : la langue, les chiffres, la motricité. Il suffit de voir les formations proposées aux enseignants pour constater que nous sommes bien loin de cela.

On peut également soulever la question de l’atmosphère délétère et détestable dans laquelle nous évoluons depuis quelques années. Pour étayer le propos, portons notre regard sur les pressions exercées sur les collègues français qui doivent accepter certaines basses besognes car, et on le leur rappelle fréquemment, ils peuvent “sauter”. Certains d’ailleurs se voient confier des missions abjectes.
Dans le même ordre d’idée (et paranoïa naissante oblige), quid des ordinateurs et des adresses mails professionnelles ? Ces outils semblent encore un moyen de contrôler ce que font les enseignants. En effet, étant donnée la facilité avec laquelle le service informatique peut “prendre la main” sur nos terminaux en cas de problème technique, il est légitime de se demander qui a accès aux informations contenues dans nos ordinateurs et notre boîte mail quand nous sommes connectés au réseau de notre établissement.

Il serait temps que la DENJS repense sa façon de faire, se rappelle que les enfants et l’ensemble du personnel sont autre chose qu’un numéro dans une liste ou un matricule SPME.
Bref, il s’agirait de “réhumaniser” tout cela sans quoi le ras-le-bol de ces dernières années va provoquer un réel dégoût du métier. Me concernant, cela commence à être le cas…